Home » Numéro 25-2022 » Entre nous… » Des guêpes trichogrammes pour lutter contre la pyrale du maïs (Theo Leeb)

Des guêpes trichogrammes pour lutter contre la pyrale du maïs

La pyrale du maïs et ses larves sont un problème majeur dans les cultures de maïs en Allemagne. Elle fait des trous dans les tiges, qui plient les plantes et provoque même des dégâts sur les épis. Pour la combattre, il existe différentes possibilités comme les méthodes chimiques et mécaniques. Mais il existe aussi une nouvelle méthode biologique.

Les évolutions climatiques intensifient la pression de la pyrale sur le maïs, y compris en Allemagne. Tous les ans, les larves et les chenilles de pyrale provoquent des dégâts considérables sur cette culture : casse des tiges, moindre accès à l’eau et aux nutriments, altération de la qualité sanitaire en créant des portes d’entrée aux pathogènes. L’effet de ces attaques sur le rendement et la qualité des récoltes est donc bien réel.
Toutefois, il existe des mesures biologiques de lutte préventive contre la pyrale : les trichogramma brassicae, couramment appelés trichogrammes, des petites guêpes d'environ 1 mm. La femelle trichogramme pond ses œufs dans ceux de la pyrale, empêchant ainsi le développement du ravageur.
Le cycle de la pyrale du maïs commence généralement en juin ou juillet, selon les régions, par l’envol des papillons ayant hiverné dans la culture de l'année précédente. La femelle pyrale pond ses œufs le plus souvent sur la face inférieure des feuilles. Environ une à deux semaines plus tard, les larves de pyrale font leur apparition et commencent à envahir la parcelle et à s’attaquer aux plants. Durant la phase végétative, les chenilles creusent des galeries tout le long de la tige. Après la récolte, elles se trouvent généralement à la base de la tige et peuvent très facilement hiverner dans les résidus de chaume.

Pour Theo Leeb, en parallèle des méthodes chimiques et mécaniques, il est également primordial de mettre en œuvre des mesures préventives alternatives. Au Brésil par exemple, des expérimentations sont menées avec différents types de bactéries pour limiter le recours aux produits phytosanitaires. « En règle générale, les cultures sont protégées par un insecticide. Mais la lutte contre la pyrale passe aussi par un broyage mécanique minutieux des chaumes de maïs afin de détruire son habitat. Par ailleurs, nous nous intéressons tout particulièrement à l’utilisation des guêpes trichogrammes, qui prend de l’importance. Le sud de l’Allemagne et la Bavière ne sont pas réellement impactés par la pyrale du maïs. En revanche, les dégâts sont très conséquents dans d’autres régions ou pays, particulièrement en Europe de l’Ouest et du Sud, dans des pays comme la Hongrie où la culture du maïs est importante. »

Largage de trichogrammes dans les parcelles de maïs

Plusieurs techniques sont envisageables pour installer une colonie de guêpes trichogrammes au sein d’une parcelle de maïs. La méthode la plus courante est le recours à des capsules biodégradables d’environ 20 mm de diamètre, contenant les larves de guêpes. Ces capsules en cellulose se dissolvent, au contact de l’eau, et libèrent les trichogrammes. « Il est primordial d'installer les trichogrammes au moment opportun au sein de la parcelle. Pour cela, il importe de connaître précisément le début de l’envol des pyrales et le moment de la ponte. » La technique de dispersion des capsules est tout aussi importante. « Une première solution consiste à répartir manuellement les capsules, tous les dix mètres à travers la parcelle. Mais c’est très chronophage. Une autre solution est de procéder au largage des capsules à l’aide d’un drone équipé d’un réservoir. L’engin est piloté par GPS selon un itinéraire planifié au-dessus de la parcelle et largue une capsule tous les 10 mètres. Dans le sud de l’Allemagne, cette méthode - réalisée par un prestataire de services - est utilisée depuis longtemps. Cependant, cette technique atteint rapidement ses limites du fait de la faible largeur de travail d’un drone. Les coûts initiaux liés à la planification des itinéraires sont de surcroît élevés, ce qui rend cette technique assez onéreuse au final. » Lorsque le moment décisif d’application est arrivé et que le maïs atteint parfois près de deux mètres de haut, il n’est pas envisageable de recourir à un tracteur traditionnel pour disperser les trichogrammes. Quelques essais ont été réalisés avec un tracteur enjambeur développé spécifiquement en interne pour le largage des capsules de larves de trichogrammes. Mais d’après Theo Leeb, cette technique n’aurait pas rempli ses promesses.  

Un nouveau mode de diffusion

Néanmoins, une autre solution se profile : le largage de capsules biodégradables à l’aide d’un pulvérisateur. « L’an dernier, le dirigeant de la société Biocare nous a sollicités afin d’échanger sur les techniques possibles de largage. Biocare a codéveloppé avec un partenaire un dispositif de largage de capsules. Celui-ci se compose d’un réservoir de 50x50 cm, sous lequel est intégré un doseur et un système de distribution sous pression. »   
Plusieurs de ces dispositifs de largage de capsules ont ainsi été installés à titre expérimental sur la rampe d’un pulvérisateur HORSCH Leeb. « L’installation de ces dispositifs de largage sur une rampe de 36 m garantit une dispersion plus homogène et précise, et ainsi une productivité plus élevée. De fil en aiguille, nous avons réalisé qu’un pulvérisateur n’était pas strictement limité à l’application d’engrais liquides. Il peut également servir à l’application d’engrais solides et donc de capsules de trichogrammes. Dans ce cas, le poids ne pose pas de problème, les capsules étant très légères. » Le principal défi est de garantir une dispersion homogène des capsules, à l’image d’un échiquier.

« Actuellement, notre pulvérisateur est équipé de deux distributeurs pneumatiques situés de part et d’autre de la rampe, couvrant ainsi une largeur de travail de 2 x 24 m. Chaque distributeur possède trois sorties pour le largage des capsules dans la parcelle. Nous sommes toujours en phase de mise au point d’une dispersion “en échiquier”. Suite aux résultats des essais, nous pourrons établir le potentiel d’efficacité de cette technique. Je ne m’attends évidemment pas à obtenir des résultats comparables à ceux obtenus avec l’application de produits phytosanitaires. Néanmoins, il est désormais incontournable, selon moi, de s’intéresser à ces pratiques alternatives. En effet, personne ne sait réellement ce que l’avenir nous réserve et quels compromis nous serons obligés de faire. Si les résultats sont au rendez-vous, nous projetons de développer notre propre système de dosage pour le largage de capsules. La conception de ce type de dispositif est simple – sensiblement identique à celle de notre doseur monograine. »