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HORSCH Live fait peau neuve

En 2022, HORSCH a réuni de nombreux conférenciers et invités issus de l’ensemble de la filière agricole pour informer et échanger sur les thématiques et tendances actuelles. Pour sa troisième édition, HORSCH Live adopte un nouveau format.

Au lieu d’organiser les conférences et les tables rondes sur une semaine complète à l’instar des deux précédentes éditions, HORSCH  organise plusieurs rendez-vous hebdomadaires de décembre 2022 à février 2023, avec, en préambule, deux tables rondes retransmises en direct. Les exposés sont systématiquement diffusés le lundi soir sur l’ensemble de nos réseaux sociaux allemands. Cette année, la relation entre les changements climatiques et la qualité de nos sols sera abordée autour du thème : « Des sols équilibrés pour des rendements sécurisés ».
Deux tables rondes en direct ont donné le top départ du HORSCH Live : la première a eu lieu le 29 novembre 2022 et s’intitulait « Phénomènes climatiques extrêmes – quelles évolutions en Europe centrale pour les agriculteurs et quels leviers d’action ? », la seconde s’est tenue le 2 décembre 2022 en abordant la thématique « L’argent est roi ? – quel niveau de liquidité les exploitations agricoles doivent-elles préserver ? »

HORSCH Live – top départ

Cet été a de nouveau permis de mesurer les conséquences de la météo sur notre agriculture. Les phénomènes climatiques extrêmes se multiplient et engendrent des difficultés croissantes pour les agriculteurs du monde entier. Dans la précédente édition de terraHORSCH, Frank Wechsung, docteur et chercheur à l'Institut de recherche sur les effets du changement climatique de Potsdam, nous partageait déjà l’hypothèse selon laquelle les situations climatiques persistantes sont de plus en plus fréquentes. Cela se traduit, par exemple, par la multiplication et la stagnation d’activités dépressionnaires et anticycloniques. Ces dernières sont à l’origine de l’apparition de phénomènes climatiques extrêmes sur de longues périodes.     
La table ronde HORSCH Live «phénomènes climatiques extrêmes – quelles évolutions en Europe centrale pour les agriculteurs et quels leviers d’action ? » fut l’occasion de nombreux échanges entre Rainer Langer (directeur général des assurances Vereinigte Hagelversicherung), Carl-Philipp Bartmer (dirigeant de l‘exploitation AVG Mücheln) et Philipp Horsch (directeur HORSCH Maschinen GmbH), sous la houlette de Michael Braun.
La météo et les phénomènes climatiques extrêmes ne datent pas d’hier. « La météo est une composante du climat, c’est-à-dire que le climat et la météo sont interdépendants. Le climat se matérialise par la somme des valeurs moyennes des paramètres météorologiques des 30 dernières années. Les phénomènes climatiques extrêmes  ont fait une apparition remarquée dès les premiers signes du changement climatique auquel nous assistons », selon Frank Wechsung.
Néanmoins, la récurrence et l’intensité de ces phénomènes extrêmes inquiètent. Les sécheresses printanières, mais aussi les gelées tardives sont particulièrement problématiques pour les agriculteurs. Ces phénomènes influent négativement sur le développement des cultures et provoquent des pertes importantes. Si nous ajoutons à cela des périodes de sécheresse intense sans la moindre précipitation, les pertes de récolte et de rendement sont alors quasiment inévitables. « La sécheresse et les températures élevées feront définitivement partie de la nouvelle ère climatique. Mais cela ne s’arrêtera pas là». Il faut s’attendre également à des précipitations intenses de plus en plus fréquentes et des épisodes humides de plus en plus longs. Alors que ces changements entraînent des difficultés de plus en plus grandes pour les agriculteurs européens, tout le monde s’interroge : comment se structurer afin de continuer à produire des denrées de base tout en garantissant la sécurité alimentaire d’une population toute entière ?           

Interrogé sur l’impact réel des phénomènes climatiques extrêmes en matière d’assurance, Rainer Langner apporte une réponse claire : l’augmentation est très significative ! On constate d’importantes disparités entre les pays. Les pays baltes sont touchés cette année par des épisodes humides et de nombreuses tempêtes, ayant occasionné d’importants dégâts. L’ouest est victime de la sécheresse et a essuyé aussi des pertes de récolte. Ce qui est frappant, selon Rainer Langner, c’est que les assurances allemandes indemnisent encore peu les pertes occasionnées par la sécheresse. « La majorité des assurances portent sur les pertes liées à la grêle, les précipitations intenses ou bien les tempêtes, mais beaucoup moins sur les risques liés à la sécheresse – cela représente environ 100 000 hectares selon mes estimations». En Allemagne, 2022 est fort heureusement restée dans la moyenne en matière de grêle et les dégâts ont été limités. « Nous savons par ailleurs que certaines régions ont essuyé des pertes considérables, notamment sur des cultures tardives comme le maïs. En Belgique ou au Luxembourg, nous avons également dû indemniser des dégâts importants liés à la sécheresse».        
Les années 2018 à 2022 ont été marquées par la sécheresse, mais nous avons aussi connu des conditions météorologiques inverses particulièrement extrêmes, à l’instar des événements ayant touché Ahrtal. Cette situation inédite trouve son origine dans des précipitations d’une intensité encore jamais enregistrée jusqu’ici par les stations météos locales. Les dernières années marquent une nette augmentation des dommages liés aux tornades. « C’est un indicateur de ce à quoi nous serons confrontés à l’avenir », selon M. Langner.
Philipp Horsch observe une augmentation globale des conditions météorologiques extrêmes dans différentes régions. « En particulier l’Amérique du Sud, le sud-ouest du Brésil, le Paraguay sont complètement asséchés. En Afrique du Sud, l’année a été en revanche trop humide», de même qu’en Australie, qui a enregistré des pertes importantes. 
Les épisodes durables de sécheresse ou de fortes pluies mettent les agriculteurs face à de grandes difficultés. Se prémunir contre ces deux extrêmes constitue à la fois une énorme responsabilité et un défi immense, selon Philipp Horsch. Carl-Philipp Bartmer ne peut qu’acquiescer : il faut agir en faisant preuve d’encore plus de flexibilité, de productivité et de réactivité : « L’agriculture est devenue une entreprise de planification. Elle revêt une importance toute différente». D‘après ses explications, les modèles météorologiques réactualisés et plus précis aident à optimiser l’organisation de l’entreprise et la prise de décision au regard des processus en place.
Interrogé au sujet des outils de prévisions météorologiques et de leur degré de fiabilité, Frank Wechsung déclare qu’ils peuvent être fiables sur un horizon d’une semaine. Au-delà de deux semaines, il devient difficile de donner des prévisions» Dans ce cas, pourquoi les climatologues se risquent-ils donc à prévoir le changement climatique ? On ne peut certes pas prédire précisément ce que l’hiver nous réservera, mais ce dont on est sûr, c’est qu’il sera plus chaud qu’à la normale. Cette tendance s’explique par les modèles météorologiques. Frank Wechsung souligne que la précision des prévisions météorologiques s’est fort heureusement améliorée dans les dernières années. Leur qualité résulte directement de la qualité du réseau de mesure lui-même. « On oublie souvent que les modèles météorologiques ne sont qu’une composante de la prévision. Ces prévisions sont corrigées a posteriori au regard d’informations météorologiques locales, qui émanent directement des stations météo.»             
Les intervenants ont conclu en insistant sur le fait que le climat est soumis à des évolutions d’une rapidité plus importante que celle prédite par les modèles et que l’agriculture devra faire face à l’avenir à des épisodes météorologiques de plus en plus persistants.   
Avec les difficultés causées par les évolutions climatiques se pose la question de savoir comment nourrir une population mondiale en constante augmentation. Pour Carl-Philipp Bartmer, la réponse se trouve dans un partenariat étroit entre les constructeurs de matériel agricole, la recherche et les semenciers. Langner précise sur ce point que la multiplication de nouvelles variétés plus résistantes s’inscrit dans un temps long. Bartmer insiste sur l’importance de l’adaptation des variétés, celles-ci ayant un impact décisif sur la qualité des céréales produites, notamment chez les agriculteurs allemands. Selon lui, les agriculteurs doivent considérer les semenciers comme des alliés pour réussir dans la lutte contre le changement climatique. « Chaque agriculteur doit contribuer à ce que notre industrie semencière reste viable en nous assurant l’approvisionnement de variétés adaptées et résistantes».         

L’argent est roi ?

Ces dernières années, la baisse des taux d’intérêts a largement bénéficié aux exploitations qui ont pu se financer à moindre coût. Les ratios de liquidité des entreprises affichaient de bonnes performances grâce à la mise en place de lignes de liquidité à court terme et l’encadrement des évolutions des prix des matériels agricoles. D’un point de vue purement économique, ce mécanisme de financement n’était pas pertinent. Néanmoins, l’année passée a changé la donne : les prix des matériels agricoles destinés à la production de produits agroalimentaires ont explosé. Le prix des engrais en particulier, a presque doublé par rapport à l’année précédente. Il s’en est suivi mécaniquement une augmentation du fonds de roulement des exploitations agricoles.   
La seconde table ronde HORSCH Live intitulée « L’argent est roi ? – Quel niveau de liquidité les exploitations agricoles doivent-elles préserver ? » a été l’occasion pour Deert Rieve (agriculteur en Mecklembourg-Poméranie occidentale), Felix Hollmann (conseiller indépendant et associé au sein de LBB GmbH et agroéconomiste), Bernd Werzinger (responsable commercial à la Deutsche Kreditbank AG et ingénieur agronome) et Michael Horsch de s’entretenir sur la manière dont les exploitations agricoles doivent se structurer afin de garantir leur pérennité. Lors des échanges animés par Matthias Lech (responsable produit chez Farm & Food), les intervenants ont évoqué les leviers pour maintenir son niveau de liquidité et de rentabilité, ainsi que l’influence décisive des politiques monétaires et de leurs évolutions sur le financement des matériels agricoles et les surfaces agricoles.   
En tant que conseiller clientèle entreprise, Bernd Werzinger compte parmi ses clients, aussi bien des exploitants agricoles que des vignerons. Certaines problématiques sont récurrentes . les conditions météorologiques extrêmes, l’évolution et la volatilité des marchés ainsi que les problèmes de liquidités. « Toutes les branches du secteur sont concernées avec en parallèle, des problématiques très spécifiques». Ces sujets sont aussi variés et complexes qu’il y a d’entreprises, ce qui ne facilite pas son travail au quotidien mais revêt un réel intérêt selon lui. La situation connue l’an passé dans le secteur agricole et plus largement sur les marchés fluctuants a démontré que le caractère très volatile de ces marchés nécessite une autre gestion de la liquidité. En cas d’un fort besoin en liquidité, il s’agit de savoir comment sécuriser celle-ci. « C’est là que les questions suivantes se posent : quelle part représente la vente de mes récoltes ? Qu’y a-t-il sur mon compte ? Comment doit-on procéder d’un point de vue contractuel et comment gérer ces problématiques en matière de liquidité ? Ce sont des interrogations essentielles et spécifiques au secteur agricole. »

Michael Horsch explique que depuis un an environ, de nombreuses entreprises doivent faire face à des ruptures de chaîne et à la forte hausse des prix des achats des moyens de production. Elles subissent par ailleurs des retards, voire même des défauts de livraison. Cette situation vaut aussi bien pour les agriculteurs que pour les concepteurs et fabricants de machines. Alors que les prix ont atteint leur apogée en avril, une baisse s’en est suivie en août. « Cela va encore descendre car nous nous trouvons dans une phase de récession cachée », confie-t-il. « Je ne crois pas à un retour des prix à leur niveau initial. Pour autant, les prix actuels vont stagner voire même légèrement baisser. La question est plutôt de savoir si les taux d’intérêts vont également se stabiliser à nouveau à un niveau comparable à celui d’il y a six mois. En tout état de cause, il ne faut pas s’attendre à des taux d’intérêts nuls ».   
Deert Rieve partage son opinion sur la volatilité des prix, un phénomène particulièrement soudain et imprévisible, selon lui. « La récolte de 2007 a été la plus mauvaise enregistrée ces dernières années dans le monde, ce qui a fait exploser les prix. Le prix des engrais avaient atteint le niveau de celui que nous connaissons actuellement. Puis la récolte 2008 a battu tous les records au niveau mondial, tirant lamentablement les prix du marché vers le bas. Un tel renversement de situation dans un laps de temps aussi court est très difficilement prévisible. Beaucoup d’exploitations avaient acheté l’engrais au prix fort pour le stocker à cette période. J’avais moi-même acheté de l’orge à mon voisin à 190€/t pour le revendre six mois plus tard pour 80€/t. Personne n’avait parié sur une telle volatilité des prix». Il sera très difficile, selon M. Rieve, de s’avancer sur les années à venir et d’estimer le niveau des prix. Depuis le début de la guerre, le prix du blé par exemple qui avait déjà augmenté auparavant, a connu une hausse supplémentaire de 100 €/t. De nombreux agriculteurs et même Deert Rieve lui-même avouent ne plus vraiment savoir comment anticiper et apprécier le niveau du marché.       
Selon les clients de Felix Hollmanns, les prémisses de la récession sont déjà visibles. Le fait que les banques américaines soient particulièrement vigilantes à ne pas laisser les taux directeurs s’emballer, comme cela a pu être le cas dans le passé, fait notamment partie des signes qui ne trompent pas. Ajoutons à cela le prix des énergies, qui a de nouveau subi une baisse, à l’instar du pétrole brut. Pour Hollmann, le blé reste la seule denrée dont le niveau de prix reste relativement peu volatile. « Je craignais que le prix du blé ne tombe à 200 €/t et que cette baisse crée un trou dans la trésorerie au regard des prix par ailleurs élevés des engrais.» Or, on assiste en fait à une baisse concomitante du prix du blé et des engrais. Un contexte permettant a priori, selon Hollmann, d’éviter les risques liés au manque de liquidité.
Interrogé par un spectateur à propos des risques à moyen terme d’une baisse du fonds de roulement, Rieve explique que cela est conditionné directement par le prix des engrais, des semences et des produits phytosanitaires. « Nous pensons qu’ils ne redescendront pas à leur niveau d’origine et nous espérons par ailleurs que le prix du blé ne subira pas de baisse au-delà des 180 €/t enregistrés par le passé. Autrement, les exploitations pourront très difficilement faire face à une nouvelle hausse de leurs actifs circulants ou de leurs coûts directs. L’équation est très simple. » 
La thématique des surfaces et des baux agricoles divise les agriculteurs. Michael Horsch connait de nombreux agriculteurs, y compris à l’étranger, qui témoignent de leurs difficultés à agrandir leur exploitation. Cela résulte des conditions des contrats de fermage, qui concernent 50 à 60% des surfaces cultivées au monde. Avec l’augmentation des indices de fermage, les agriculteurs doivent user de calculs pour conserver leur S.A.U. « Les taux augmentent de manière astronomique. Et lorsque le taux des baux agricoles sont élevés, ils le restent », affirme Michael Horsch.  
A la fin de la table ronde, les intervenants ont pu prodiguer des conseils. Bernd Werzinger insiste notamment sur la nécessité de réaliser un audit financier réaliste de l’exploitation pour déterminer si la stratégie actuelle est toujours adaptée ou bien si elle nécessite des ajustements. La passion et l’enthousiasme engagés au sein de son entreprise sont évidemment des facteurs incontournables de réussite, témoigne Hollmann. « Il est en outre conseillé d’avoir un compte courant ou une réserve d’argent alimentés à hauteur de 200 € par hectare peu avant la récolte pour rester serein jusqu’à la prochaine récolte.»     
Michael Horsch est optimiste pour l’avenir et persuadé que nous serons en mesure de surmonter une récession, aussi forte soit elle : « Je sais que nous sommes, nous les Allemands, capables de travailler quand nous sommes contraints. Nous l’avons déjà prouvé lors de la crise financière et nous le prouverons de nouveau à travers la crise actuelle. Je ne vous dis qu’une seule chose : peu importe si la situation dure une, deux ou trois années – nous nous en sortirons quoi qu’il arrive». Pour ce qui est de la situation des agriculteurs, Michael Horsch n’a pas de grosses inquiétudes car il sait que ces derniers sauront surmonter cette période particulièrement difficile.   

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