Les journées de la Lucine renouent avec le succès
Comme annoncé dans notre dernière édition de terraHORSCH, les Journées de la Lucine se sont déroulées les 10 et 11 septembre derniers au siège social de HORSCH France. Organisé tous les deux ans, cet évènement institutionnel propose un programme mêlant rencontres, réflexion et démonstrations de matériels à destination de clients et concessionnaires HORSCH. Cette année, plus de 900 personnes ont fait le déplacement sur le site de la ferme de la Lucine à Châteauvillain.

Cette année encore, l’évènement a été plébiscité : des intervenants de qualité et d’envergure internationale, une organisation et un accueil soignés, sans oublier l’authenticité des échanges avec la famille Horsch. Michael, Cornelia et leur second fils Constantin Horsch étaient présents pour l’occasion. Malgré une météo plutôt capricieuse, l’enthousiasme et la convivialité étaient au rendez-vous. Cette édition 2024 a pris une saveur toute particulière puisque l’entreprise fondée en 1984, fêtait ses 40 ans. Le hangar de l’exploitation avait donc été spécialement scénarisé pour l’occasion afin de replonger les convives dans l’histoire de l’entreprise tout en les invitant à l’optimisme.
Réflexions et échanges
Le choix des thématiques des conférences fait écho à l’ADN de la marque : « à chaque nouvelle difficulté, sa solution ». C’est précisément cette philosophie que l’entreprise souhaite transmettre à travers son nouveau slogan dévoilé en juillet :
« WE WILL FIND A WAY. ». « Notre groupe est largement présent à l’international. C’est pourquoi, nous avons décidé de choisir une signature en anglais », a déclaré Cornelia Horsch en introduction.« Le nouveau slogan manifeste notre volonté de relever les défis agricoles actuels et futurs avec les clients, les partenaires et les employés, et de trouver des solutions durables, quelle que soit la tâche à accomplir », a insisté la directrice marketing et commerciale du groupe HORSCH.
Premier marché à l’export, la France est un important foyer d’innovations puisque les agriculteurs français sont toujours à la recherche de technologies et d’idées nouvelles afin de rendre leurs systèmes plus résilients et performants. Une particularité incarnée par le témoignage de Fabrice Lugnier, client HORSCH « défricheur » ayant contribué au développement de l’Avatar en France.

Le programme des deux matinées de conférences est resté fidèle à la philosophie de la marque : entre analyses macroéconomiques et sociologiques, partage de connaissances agronomiques et témoignages de clients agriculteurs. L’ouverture et la liberté de parole étaient au cœur des échanges avec le public présent.
De nombreux matériels et nouveautés à l’honneur
Au regard de la météo pluvieuse, le programme de l’après-midi a été adapté en conséquence avec un show machines élargi. Dix-neuf ensembles ont évolué sous le regard passionné des participants. Côté nouveautés, le travail du sol superficiel était largement représenté avec l’élargissement de la gamme Finer avec la version traînée en 8 mètres et l'arrivée de grands disques de 580 mm sur la gamme Joker RT et CT. Le nouveau déchaumeur à disques Joker 12 CC (prototype) a impressionné au champ aux côtés du nouveau semoir à dents Sprinter CO, mis en terre à la faveur d’éclaircies dans l’après-midi du 10 septembre. Côté semis monograine, les participants ont pu découvrir le tout dernier semoir 3-points Maestro 6 AX dédié aux tracteurs compacts 4 cylindres ainsi que le Maestro 12.75 CX. En matière de pulvérisation, la gamme HORSCH Leeb a été mise à l’honneur lors d’une démonstration dynamique : le pulvérisateur Leeb LT a évolué aux côtés des deux automoteurs Leeb PT et VT. Les nouvelles générations de trémies frontales Partner 2.1 et 2.5 FT de capacité de 1700 et 2500 litres ont suscité un grand intérêt auprès des visiteurs présents, celles-ci se positionnant comme des alliées des combinés de semis, semoirs monograine, déchaumeurs ou encore bineuses pour l’application de plusieurs produits.

Jour 1 – Dépendances et défis énergétiques : comment résoudre l’équation ?
« Il y a seulement 1 milliard d’ha de terres céréalières disponibles pour nourrir plus de 9 milliards en 2050. Or, les rendements stagnent voire chutent et les problématiques climatiques s’amplifient. Pour résoudre cette équation, il faut sans cesse innover avec et pour tous les agriculteurs, peu importe le modèle et la taille de leur exploitation »,a déclaré Michael Horsch.

Ce constat s’applique directement à la problématique des ressources énergétiques, au cœur de la réflexion du 10 septembre. L’agriculture doit, comme tous les autres secteurs d’activités économiques, prendre conscience de l’envergure du défi à relever : remplacer en 30 ans le pétrole, le gaz et le charbon par des énergies renouvelables. L’éclairage de Benjamin Louvet, expert des matières premières et gérant d’actifs chez OFI AM, a permis de cerner les ressorts des marchés pétroliers (bassins de production, différentes typologies de pétroles, enjeux géopolitiques) et des défis posés par la transition énergétique en matière de dépendances et de coûts de l’énergie. Le pétrole reste la principale source d’énergie avec un pic de production à l’horizon 2028-2030. L’énergie hydroélectrique est désormais à son potentiel maximal, quant au nucléaire, il ne permettra pas de répondre à la totalité des besoins énergétiques mondiaux. Le déploiement accéléré des énergies renouvelables, solaires et éoliennes restent donc les voies privilégiées politiquement pour accélérer la transition énergétique pour répondre aux objectifs des accords de Paris. Notre dépendance aux énergies fossiles se transforme donc en dépendance aux métaux : « Pour la construction d’une éolienne, il faut entre 950 kg et 5 tonnes de cuivre. [...]
On a besoin de 6 fois plus de métaux rares pour construire une voiture électrique qu’une voiture thermique », illustre Benjamin Louvet. Cette transition implique donc de s’habituer à payer l’énergie plus chère dans les 10 à 20 prochaines années car si les métaux nécessaires sont bien disponibles sous terre, leur extraction et leur transformation restent longues et coûteuses. Face à ces réalités macroéconomiques, il s’agit pour les agriculteurs de saisir les opportunités d’autoproduction et d’autoconsommation en produisant de l’énergie verte (méthanisation, agrivoltaïsme, éolien). Benjamin Louvet souligne par ailleurs le rôle des pouvoirs publics : « Pour réussir cette transformation du système énergétique, l’État doit investir et subventionner les initiatives positives ».
Pour Maximin Charpentier, agriculteur et Président de la chambre d’agriculture du Grand Est, l’agriculture est un des secteurs d’avenir de la décarbonation. Il met en exergue les opportunités dont disposent les exploitations agricoles pour produire de l’énergie verte sur leurs territoires. Une ambition qu’il porte au sein de Terrasolis : « Avec la biomasse, nous avons de l’or dans les mains. Aujourd’hui, les grands groupes la rachètent à bas coût et la valorisent. Autant le faire directement. Nous sommes dans un monde de rupture où mon seul objectif est de trouver et de construire la solution pour les générations futures ».
La matinée s’est conclue par un éclairage agronomique du Prof Dr Bernhard Bauer de l’Université des Sciences Appliquées de Weihenstephan-Triesdorf en Allemagne. Il a donné des pistes pour réduire drastiquement la résistance des vulpins et ray-grass en céréales en alliant chimie et itinéraires de travail du sol : prioriser les stratégies de rotation des cultures et de faux semis. A cela s’ajoutent une bonne compréhension des modes d’action et des demi-vies des matières actives encore à notre disposition. Dr Bauer a donné quelques voies en matière d’application des herbicides.
Jour 2 – Organiser son exploitation : des enjeux cruciaux
Entre déclin du nombre d’actifs dans l’agriculture, augmentation de la taille des exploitations, problématiques économiques, juridiques et humaines (encadrement, recrutement), l’exploitation agricole est en prise avec des réalités toujours plus complexes. La seconde matinée des Journées de la Lucine a été introduite par François Purseigle, chercheur en sociologie à l’INP Toulouse et chercheur associé à Sciences Po Paris qui a donné un éclairage crucial sur les réalités sociétales de l’organisation de l’entreprise agricole au sens large. « Une nouvelle page de l’histoire agricole est en train de s’écrire. Il est alors essentiel de bien caractériser ce qui se passe au niveau social et économique pour trouver non pas une mais des solutions aux agricultures qui sont infiniment plurielles aujourd’hui », a-t-il déclaré en introduction.Car si l’opinion publique et les politiques françaises sont nostalgiques des petites exploitations paysannes artisanales, « la ferme France » n’est plus « la ferme à papa ». L'imaginaire collectif s’oppose à une vision professionnelle et entrepreneuriale de l’agriculture moderne.

Entre déclin démographique et effacement du modèle familial
Le premier constat est sans appel : le nombre d’agriculteurs français est en déclin et les filières d’élevages sont les premières touchées (30 à 40 000 éleveurs laitiers projetés d’ici 2030 en France pour 250 000 en 1980). La moitié des chefs d’exploitation français seront en âge de partir à la retraite d’ici 2030.
Second constat : l’exploitation agricole n’est plus uniquement une affaire de famille. Si les actifs permanents familiaux (frères, parents, conjoints, …) ont maintenu l’exploitation résiliente pendant longtemps, on observe une baisse de 55% de ces derniers entre 2010 et 2020.
C’est la capacité productive du pays et in fine la souveraineté alimentaire qui est remise en cause à travers ces constats. « On ne pouvait pas dire que l’on ne savait pas » a répété plusieurs fois François Purseigle avant d’inviter politiques et agriculteurs à trouver des solutions ensemble et rapidement.
La production agricole est une activité économique comme une autre. Le « faire-ensemble » ancré dans le modèle d’agriculture traditionnelle (en famille, en regroupement d’agriculteurs …) évolue vers le « faire-faire » qui oblige les exploitants à repenser leurs pratiques. D’un point de vue économique, l’agrandissement des exploitations et le recours à la contractualisation non-familiale est aujourd’hui une réalité indiscutable. L’agriculteur est un chef d’entreprise qui doit recourir à des salariés. Actuellement, 930 000 actifs salariés agricoles (embauchés directement ou par l’intermédiaire de société spécialisées) travaillent au sein des exploitations agricoles françaises. Cela représente une hausse de 71% des salariés des entreprises de travaux agricoles et de 249% de salariés de groupements d’employeurs. Cette main d’œuvre, non familiale, atteindra plus d’un million d’actifs en 2030. Cette réalité n’est pas sans conséquence sur la rentabilité et la pérennité de l’entreprise de production agricole.Interrogé par un agriculteur de l’Aube sur le« grand écart » entre les politiques et la réalité économique des exploitations et le défi de trouver une stratégie agricole, François Purseigle affirme : « L’agriculture française est fantasmée, idéalisée et non pensée comme elle l’est en réalité. C’est ce qui crée une rupture entre les agriculteurs et les décideurs. Le vrai défi est de mettre les familles agricoles au service d’un projet économique en tant que tel, indépendamment des liens de filiation qui les unis ».
Simplifier et diversifier : le secret pour pérenniser son exploitation ?
La matinée s’est poursuivie avec le témoignage haut en couleur de l’entrepreneur britannique James Peck, à la tête de l’ETA PX Farms Ltd qu’il a créé en 2003. « Mon leitmotiv pour gérer mon entreprise est le suivant : innover, s’adapter, se surpasser. Chaque décennie a son lot de défis. Mon rôle est d’insuffler une vision afin de préserver la motivation de mes équipes et la rentabilité de mes activités aujourd’hui et demain », introduit James Peck en s’identifiant à la vision de Michael Horsch. Son entreprise comprend trois sites et s’étend sur 5 100 hectares. L’exploitation des terres implique de parcourir des distances allant jusqu’à 150 km ce qui nécessite des moyens logistiques conséquents. Depuis la reprise de la ferme familiale en 1999, James Peck poursuit une stratégie de diversification des actifs (location des bâtiments non utilisés) afin d’augmenter sa capacité d’emprunt et de financer l’agrandissement de l’exploitation. Aujourd’hui, PX Farms propose une large palette de services qui s’étend des travaux publics avec notamment la construction d’infrastructure de stockage, aux prestations de travaux agricoles en passant par la location de bâtiments jusqu’aux services de logistiques et transport. Les travaux agricoles représentent actuellement 57% de son chiffre d’affaires. Le blé de meunerie constitue la culture principale avec 15 000 tonnes produites. Il produit de l’orge (8000 t), de l’avoine (1800 t) et des pois (1500 t) et valorise de la paille qu’il vend à une usine de production d’électricité. PX Farms représente par ailleurs le plus gros producteur de moutarde d’Angleterre. Cette année, le niveau de rendement a baissé de 30% au global. D’un point de vue de l’organisation du travail, l’exploitation travaille avec des outils de 12 mètres de large (2 Terrano, 1 Joker, 6 semoirs) suivant la logique du Control Traffic Farming. Pour maintenir ses équipes en place, l’ensemble des salariés sont nourris et logés à Cambridge de juillet à octobre et perçoivent des bonus.
« Chaque décennie a son lot de défis. Mon rôle est d’insuffler une vision afin de préserver la motivation de mes équipes et la rentabilité de mes activités aujourd’hui et demain »
James Peck
James Peck mise par ailleurs sur la communication digitale afin d’accroître sa visibilité et valoriser l’image de l’agriculture. En moins d’un an, sa chaîne YouTube enregistre 17 000 followers.
James Peck a rappelé les effets délétères du Brexit en matière d’approvisionnement de pièces et de machines en provenance de l’Europe mais également la baisse des subventions publiques.
Revoir ses pratiques, simplifier et rationaliser : le cas d’AgroVation
Constantin Horsch a pris le relais pour parler des défis quotidiens et des changements mis en œuvre afin d’honorer le contrat passé avec son père Michael. Avec son frère Lucas, il prend la responsabilité de l’exploitation familiale AgroVation achetée en 2012 et décide de faire évoluer l’organisation classique (ferme avec un chef de culture) vers une entreprise de production céréalière rentable et simplifiée. L’objectif derrière cela : savoir gérer une exploitation et connaitre les réalités du terrain avant d’endosser d’autres responsabilités au sein du groupe HORSCH.

Depuis 2017, les deux frères ont donc changé le mode d’organisation et le style de management en optant pour une organisation horizontale, en réorganisant la structure administrative tout en mettant en place une communication interne axée sur l’autonomie et la responsabilisation des salariés. Cet exemple de transmission au sein de la famille Horsch s’est affichée comme un « contre-exemple » par rapport aux tendances décrites par François Purseigle. Même si Cornelia Horsch a pu concéder que « ce n’est pas facile tous les jours de travailler en famille », la clé de cette entente est la délégation et la confiance accordée aux collaborateurs dans les tâches à accomplir. De manière identique à James Peck, Constantin Horsch a mis en place un système de prime pour les salariés (par ex. lié aux soins apportés à l’utilisation du matériel).
Cultiver l’optimisme : la clé face à un monde en perpétuel mouvement
Laura Lange, philosophe, a fait réfléchir l’audience sur les défis du changement et de la transition. Evoluer dans un monde en perpétuel mouvement implique de maintenir un sens à son travail mais surtout un optimisme constant pour rester maître de sa vie professionnelle. Une résonnance toute trouvée avec la nouvelle signature de HORSCH, « WE WILL FIND A WAY. » : une invitation à prendre du recul, défricher pour faire face aux difficultés et avancer avec confiance.